Beatrice Moricci est une photographe toscane qui a fait de la crise une opportunité : prendre du temps pour elle. Elle a marché, elle a ralenti, elle a parcouru toute l’Italie depuis le sommet du Grand Saint Bernard jusqu’à l’extrême Sud, à Santa Maria di Leuca, 1800 km le long de la Via Francigena. Elle se confie à l’AEVF.
Béatrice a une voix vive et un accent qui ne laisse aucun doute sur ses origines toscanes. Elle est photographe de métier et, pour son travail, a souvent été amenée à être dans la campagne siennoise. Elle y a rencontré, outre des paysages de cartes postales, les panneaux représentant le pèlerin de la Via Francigena.
“Je me suis toujours dit, en passant rapidement à côté de la signalétique du pèlerin, qu’un jour je reviendrais, lentement, pour approfondir ces lieux que pour le travail j’atteignais et vivais de façon frénétique. J’ai senti l’appel de la découverte. L’année dernière, en 2019, j’ai commencé à parcourir quelques étapes de la Via Francigena et j’en suis immédiatement tombé amoureuse : “Cette expérience doit être prolongée et vidée de sa substance”, me suis-je dit.
Beatrice avait donc prévu de parcourir la Via Francigena du Sud l’année suivante, en 2020. Parmi tous les inconvénients qu’elle a pu compter, elle ne pouvait cependant certainement pas prévoir la plus grande pandémie de l’ère moderne, le premier et impressionnant confinement mondial qui a changé nos habitudes et – souvent – nous a obligés à faire de nouveaux projets.
Mais si Béatrice avait fait l’hypothèse de renoncer à quelques semaines de travail cette année, afin de se consacrer au chemin, elle ne pouvait certainement pas s’attendre à ce qu’une telle occasion se présente à elle en raison de la crise. La saison n’est certainement pas la meilleure pour les photographes de mariage, puisque la plupart d’entre eux ont été reportés. Mais pourquoi ne pas transformer la crise en l’opportunité qu’il attendait ? Et si c’était le moment que Béatrice recherchait, l’année 2020 s’annonçait.
“Pourquoi ne faire que le Sud ?” dit-elle alors. Et la voilà, le 24 juin, au sommet du Grand Saint-Bernard dans la Vallée d’Aoste, prête à parcourir les 1800 km jusqu’à la pointe de la botte italienne.
Un voyage non seulement à pied mais aussi, et surtout, avec la tête et le cœur. Un cœur qui s’est senti comme à la maison tout au long du chemin, grâce à l’accueil que la photographe nous dit avoir trouvé presque partout. La tête, en revanche, a éprouvé l’émotion de se sentir libre avec la conscience, reflétée dans les yeux de ceux qu’elle rencontrait, de faire un geste simple mais révolutionnaire : celui de marcher (une femme, seule) à travers bois et campagne. Il y a eu beaucoup de regards curieux, étonnés et interrogateurs. Chacun lui a offert un sourire, une histoire, quelque chose qui a rendu son voyage unique.
De certains de ces regards et émotions rencontrés en chemin, Béatrice ne pouvait que faire une collection photographique. Quelques clichés sont déjà apparus sur son profil Instagram “Récit d’une aventurière“. Ce qu’elle deviendra, elle le verra calmement une fois de retour. Il faut du temps pour retravailler une expérience si pleine d’émotions, d’anecdotes et d’expériences : “J’ai apprécié le voyage, l’errance de l’esprit et le regard. Il était temps de collecter, un temps de donner et d’échanger. Le temps viendra alors de tout faire prendre forme”.
Beatrice Moricci a 33 ans, elle vit à San Giovanni Valdarno et photographie des mariages en Toscane et en Italie, parfois à l’étranger. Elle a parcouru 1800 km (1400 km à pied et 400 km à vélo) du 24 juin au 24 août.