Marzia Liuzza est diplômée en Tourisme, Culture et Développement territorial. Elle croit et travaille pour un tourisme responsable, durable et de qualité. C’est pourquoi elle s’occupe de la valorisation des territoires et de ses composantes matérielles et immatérielles, en mettant l’accent sur la communauté et le patrimoine culturel. Elle a écrit cet article qui parle de la Via Francigena.
FRANCIGENA : LA VIA DES CULTURES
Le voyage. Une pratique très ancienne
L’étymologie du mot “voyage” vient du latin via. Ce terme désigne l’idée d’un voyage le long d’un itinéraire, d’un chemin. Les anciens chemins, tels que la Via Francigena, étaient autrefois empruntés par les pèlerins, les rois et les marchands. Le voyage est également mentionné dans la Bible. Dieu invite l’homme à peupler la terre et Dieu est également défini comme celui qui protège le voyageur. Dans les Saintes Écritures, il y a plusieurs références à la demande de protection de la part de ceux qui s’apprêtent à entreprendre le voyage. Le voyage est perçu comme une expérience qui nous transforme : cette pratique permet la rencontre de cultures différentes et le transport d’un patrimoine culturel inestimable. Lorsque nous revenons du voyage, nous ne sommes plus les mêmes personnes qu’à notre départ, nous sommes plus riches humainement et culturellement.
Des écrits de Sigéric à l’Itinéraire Culturel du Conseil de l’Europe
La Via Francigena, telle que nous la connaissons, a été reconstruite grâce au journal de l’archevêque Sigéric. De nombreux pèlerins de toute l’Europe ont utilisé cet itinéraire pour atteindre Rome et faire leur voyage vers la sainte bénédiction. En 1300, en effet, le Pape Boniface VIII, à travers l’Antiquorum Habet Fida Relatio, a proclamé la première indulgence plénière de l’Église Catholique. Avec le jubilé, il y a eu un afflux massif de pèlerins à Rome, à tel point que le Pontife a accordé l’indulgence pour toute l’année et tous les cent ans à l’avenir.
Le journal de Sigéric
En 1994, l’itinéraire a obtenu la certification d’Itinéraire Culturel du Conseil de l’Europe, une certification prestigieuse qui implique des normes de qualité élevées en matière de développement touristique. La Via Francigena peut être considérée comme un exemple de gestion efficace du développement territorial et économique. Elle a réussi à utiliser le territoire de manière stratégique, en mettant les communautés et le patrimoine culturel au centre, tout en générant un bien-être économique et social et en développant une filière touristique efficace.
L’itinéraire traverse la France, l’Angleterre, la Suisse et l’Italie, et chaque année, de nombreux pèlerins entreprennent le voyage. En fait, même le géant de la réservation en ligne Booking l’a inscrite parmi les cinq meilleurs pèlerinages en Europe.
La Via Francigena relie l’Italie du nord au sud par d’anciens chemins que l’on peut parcourir à pied ou à vélo. D’Aoste à Matera, de nombreux itinéraires sont proposés. Il s’agit de chemins immergés dans la nature, où l’on peut vivre des expériences authentiques, rencontrer d’autres pèlerins, visiter différentes villes et savourer les saveurs et les traditions locales. Les pèlerins les plus audacieux, qui parviennent à parcourir les 100 derniers kilomètres à pied ou 200 km à vélo, jusqu’à atteindre Saint-Pierre, obtiennent le testimonium, un document qui atteste le pèlerinage à Rome devotionis causa.
Le testimonium
Via Francigena for future : quel avenir nous attend ?
La phrase déterminante de la dernière année 2020 était d’éviter les foules. Des sentiers tels que la Via Francigena, représentent l’une des solutions touristiques les plus optimales de l’après-covid, car ils offrent le bon compromis entre vacances et sécurité. De plus, l’Association Européenne des Chemins de la Via Francigena (AEVF) est très sensible à la question de la crise climatique et a d’ailleurs rejoint le mouvement Global Strike for future avec le slogan Via Francigena for Future. L’objectif est d’améliorer et d’accroître la promotion de toutes ces pratiques, qui peuvent encourager les pèlerins à se comporter de manière plus durable, conformément aux objectifs de l’Agenda 2030.
En 2021, le grand événement “Road to Rome” est attendu, organisé par l’AEVF à l’occasion du vingtième anniversaire de sa fondation. Une épreuve de relais pour retracer les 3200 km de la Via Francigena.
En conclusion, des itinéraires tels que la Via Francigena réussissent aujourd’hui à relier, par la pratique de la marche, des histoires et des lieux géographiquement éloignés sous un même patrimoine culturel européen. Un porteur de valeurs tangibles et intangibles, d’histoires, de récits et de rencontres le long des différents parcours. Comme l’a également dit l’historien médiéviste Jacques Le Goff, “la Via Francigena peut être considérée essentiellement comme une route des cultures. S’engager sur la Via Francigena, c’est s’engager dans la réalisation d’une Europe des cultures”.
Marzia Liuzza